Sur son site "Terre à ciel", Cécile Guivarch est la première à rendre compte des quatre nouveaux livrets parus dans la collection Lampe de poche. Voici ce qu'elle en dit.
1) Avec Architecture de l’orage, Philippe Païni, tout en subtilité et en images, à travers l’orage et la nature, dit l’amour, le désir, l’existence. On pourrait le lire au premier degré mais cette écriture a de la profondeur et conduit le lecteur à se reconsidérer.
toute rivière qui naît connaît
l’instant de sa perte
elle entre sous les arbres et se jette dans la
nuit
feuillage et racines
font un seul étonnement dont longtemps la
lumière
témoigne pour nous
qui n’y prenons garde
2) Le recueil d’Olivier Bourdelier, À la fin dormir, me laisse sur une bonne impression. Un ton entre le contemporain et l’ancien, entre sommeil et vie, et évoquant la mort. Il s’adresse à ses déjà morts, pense également à sa propre mort.
Le temps passe, la vieillesse et la mort surviennent, et ce sera pour tout le monde pareil.
Les jours sont courts
j’ai mis dedans
ce que j’ai pu de joie
les jours rallongent ma bouche
les traits de mon visage tombent
mes amis ont marché pendant que je dormais
les jours sont courts
oh mets dedans
ce que tu peux de joie.
3) Avec Ma ténèbre, plaisir de retrouver la langue de Valérie Rouzeau, ce qu’il y a d’enfance et sûrement quelque chose qui revient, tenace, « ma ténèbre » à sortir « de la bouche des enfants ». Petits poèmes de quelques vers, parfois sans grammaire ni conjugaison où parfois Vanessa Paradis se mêle à Mozart et à Vivaldi. Ténèbre mais jamais sombre. Petit livre à dévorer.
Ma ténèbre gratte
À la porte à la lourde
Comme une patte de chien
4) Une langue qui bouge avec Igrec ou bien, de Gwénola Morizur. Un igrec tout simplement énigmatique, qui nous fait prendre le train, vers un quotidien ou ailleurs. Igrec comme l’écriture, comme une personne, à qui l’on parle. Igrec, on s’interroge sur notre « parenthèse vivante », mais igrec « consolide les racines ». Bref, j’adore !
Igrec
c’est pas normal
persil / sauge / ciboulette
je dis
si tout était normal
ce ne serait pas
- la vie -
dans l’odeur des jasmins