Automne-hiver 2006

L’ORÉE D’UNE PAROLE
PIERRE BACLE
Rougerie
(7 rue de l’Echauguette – 87330 Mortemart)
65 pages – 10,45 €

Poèmes réflexifs, à la fois brefs et denses, les textes de Pierre Bacle évoquent les moments d’avant poème où le temps reste en suspens, avant que l’écriture ne s’élance et ne se fixe. On comprend que le travail du poète est celui d’un guetteur de signes qui doit démêler l’oubli des souvenirs, « retenir les paroles d’eau / déchiffrer le passage / des apparences ». Dans ces instants sources, il faut réveiller ce qui sommeille, guetter ce que l’on peut extraire du silence, chercher de possibles liens entre le monde sensible et la trace qu’on laissera dans le poème. Lorsque la parole viendra à éclore, peut-être dressera-t-on ce constat : « je me suis rendu compte que j’étais travaillé plus que je n’avais travaillé moi-même la vérité »…
Emmanuel Flory


LOIRE
PAUL BADIN
Tarabuste
(Rue du Fort – 36170 Saint-Benoît-du-Sault)
86 pages – 12 €

La Loire, paysage et personnage principal du recueil, ne tarde pas à devenir un prénom : Loire. Un prénom de femme. Au fil des saisons, le poète guette le fleuve au saut du "lit" « encore mouillé de tendre insomnie », caresse ses contours : « Loire est nue sous sa jeune robe d’été ». D’une facture très classique, ce long poème amoureux se réclame à la fois de Du Bellay et de Julien Gracq, cités en exergue. Mais si la langue peut paraître précieuse à force de lyrisme, c’est surtout qu’elle est précise. D’une précision de haïku japonais ou de fable naturaliste : les « longs cols soliflores » des hérons évoquent irrésistiblement Jules Renard. C’est l’impressionnisme délicat des instantanés qui séduit le lecteur : Loire invite à la contemplation.
Dominique Fournil


RIVES SUD
PAUL BADIN
Le chat qui tousse
(Le Déharais – 44130 Bouvron)
25 pages – 5 €

Parallèlement à ses « cartes postales de Loire », Paul Badin publie une série de cartes postales des îles du sud – Corse, Cyclades, Crête – puis du Maroc. Il réinvente le guide vert par des poèmes en prose où affleure avec un désenchantement croissant la nostalgie d’un sud mythique, mythologique et millénaire. Si le lyrisme est parfois un peu grandiloquent, c’est que la désillusion du touriste est immense qui compare son sud fantasmé à la réalité « [des] flots conquérants de coca cola music ». On pense encore à Julien Gracq et à son voyage à Rome : « La civilisation gréco-latine commence à s’embrumer un peu pour nous », écrivait-il. Quoique moins « délicat » que Loire, Rives sud témoigne d’un sens certain du détail contemplatif et de l’image ciselée.
Dominique Fournil


SOUDURES, ETC.
JEAN-CHRISTOPHE BELLEVEAUX
Polder
(20 rue du Pâtis – 89130 Toucy)
58 pages – 6 €

« Voici des poèmes qui n’ont l’air de rien : pas de discours, peu de mots, pas ou peu de métaphores ». Jean-Claude Pinson commente ainsi l’écriture de Jean-Christophe Belleveaux, évoquant par ailleurs « un art de la notation », « un sens très sûr du silence et des ondes que peuvent y faire résonner quelques mots bien choisis ». C’est qu’on a là un auteur atypique. Point d’emphase lyrique, point de formalisme édulcoré. On est dans la vie même, et les « oliviers / tordus sur l’ocre » sur lesquels l’œil du poète s’arrête, on croit les voir à l’intérieur du poème. Mais cette poésie ne se veut pas pour autant un reflet fidèle du monde, elle est plutôt une sorte de miroir brisé. Des éclats oui, des tessons de réel – « je froisse les évidences », lit-on – pour se sentir un peu plus vivant.
Romain Fustier


L’OMBRE DE L’OISEAU DE PROIE
MICHEL COSEM
L’amourier
(223 route du col Saint Roch – 06390 Coaraze)
88 pages – 12 €

Notes de voyages réels ou imaginaires, les poèmes de Michel Cosem, en vers ou en prose, dessinent des paysages et des saisons baignés de douceur ou de tendre nostalgie. L’ombre de l’oiseau de proie peut ainsi se lire comme la chronique des jours ordinaires où le ténu entre en communication avec des espaces plus vastes, jusqu’à ce qu’un petit rien fasse saillie dans la trame des jours : « Tes petites jambes / moulées de noir / sont jolies / dans ce matin banal / Sur le béton des villes ne poussent plus que les fleurs humaines qui vont et viennent et se retirent ». Chaque moment consacré par l’écriture est une révélation qui teinte de merveilleux les apparences du quotidien, à la frontière du réel et de l’imaginaire.
Emmanuel Flory


SANS RAISON APPARENTE
FRANCK COTTET
Gros textes
(Fontfourane – 05380 Châteauroux-les-Alpes)
66 pages – 6 €

Des poèmes « sans raison apparente ». D’une apparente simplicité qui caresse le lecteur. « J’apprivoise les riens de la journée ». La femme et les filles aimées, la maison, le jardin, les moments partagés, mais, surtout, les lumières des jours qui passent et les empreintes qu’elles laissent en nous. Chaque poème est une trace de paysage intérieur, de ces instants rattrapés par le bout de la manche. À tel point qu’on est là, aussi, à se glisser dans les interstices de la vie que le poète met à jour. « On ne se parle pas toujours / quand on est ensemble / parfois / on laisse juste un peu d’air / entre nous ». L’œil innerve le recueil, se pose réellement sur les choses et ne retourne pas si vite à sa place. Nous gagne l’inquiétude de laisser s’échapper du ciel bleu, même un jour gris.
Amandine Marembert


L’ANNÉE POÉTIQUE 2005
PATRICE DELBOURG & JEAN-LUC MAXENCE
Seghers
(24 avenue Marceau – 75381 Paris Cedex 08)
276 pages – 17 €

Les éditions Seghers renouent avec une tradition abandonnée depuis 1977 : rendre compte de la richesse de l’année poétique écoulée. Il s’agit de publier « un livre capable de rassembler les consécrations et les promesses, forces vives de la poésie française ». Patrice Delbourg et Jean-Luc Maxence, à qui est confiée cette lourde tâche, s’en sortent plutôt bien, avec rigueur et ouverture d’esprit, évitant l’écueil de privilégier tel ou tel courant. Mais comme il faut faire de la place pour les poètes officiels (Bernard Noël, Jean Orizet, Jacques Reda, Jacques Roubaud, Robert Sabatier, etc.), c’est la jeune génération qui paie les pots cassés : seulement huit auteurs sur cent vingt ont moins de quarante ans. On espérait plus d’audace. On se contente d’un palmarès.
Romain Fustier


LETTRE D’UN ÉDITEUR DE POÉSIE À UN POÈTE EN QUÊTE D’ÉDITEUR
LOUIS DUBOST
Ginkgo
(47 villa des Princes – 92100 Boulogne)
128 pages – 7 €

Quel poète n’a pas rêvé un jour de voir édité le chef-d’œuvre absolu qu’il vient d’écrire ? Louis Dubost dirige une maison d’édition de poésie de référence, « L’idée bleue » (ex-Le Dé bleu), qui ne publie quasiment que sur invitation. On imagine très bien le nombre de déçus que cela engendre chaque année. Or Louis Dubost ne donne une réponse personnalisée qu’aux poètes qui n’ont pas envoyé leurs manuscrits à l’aveuglette, qu’à ceux qui ont manifestement pris la peine de lire quelques-uns des ouvrages qu’il édite. Aux autres, il joint sous forme d’opuscule cette « lettre », rééditée ici, où puiser, écrit-il, « quelques conseils que j’ai l’outrecuidance de croire plutôt pertinents ». À méditer.
Romain Fustier


DE L’AIR
ANTOINE ÉMAZ
L’idée bleue
(6 place de l’église – 85310 Chaillé-sous-les-Ormeaux)
112 pages – 13,50 €

Un livre architectural. Cinq parties presque égales, constituées de quatre à cinq sous-parties regroupant chacune quelques poèmes. Des titres secs, plutôt désabusés : « Panne », « Poisse », « Ordinaire », « Routine », ou encore « Doute ». Une datation précise des poèmes. C’est qu’il s’agit d’une écriture à hauteur d’homme, d’une écriture avançant sur la corde raide des jours : « heure à heure haler le jour / à salaire inchangé // on dit fatigue usure / comme si c’était le plat du jour / ou météo passagère ». Le constat est amer, mais il laisse vite place à une énergie du désespoir, à une volonté de lutte contre tout ce qui nous aliène au quotidien. Cette poésie sans concession décape en profondeur. Elle vous donne finalement une furieuse envie de vivre. « De l’air », oui !
Romain Fustier


SUR LA FIN
ANTOINE ÉMAZ
Wigwam
(14 boulevard Oscar Leroux –35200 Rennes)
Non paginé – par abonnement

Sur la fin d’une vie, « qui n’en finit pas de finir », celle de la mère. Âpreté pour dire ce qui reste de vie et morceaux épars de ce qui demeurera. Travail de mémoire qui débute dans l’antichambre de la mort. La force du recueil réside dans le fait d’approcher, par l’écriture, le partir en train de se faire, le tremblé de cette expérience, tant du point de vue de celle qui s’éloigne que de celui qui regarde le train disparaître. D’où deux attentes, différentes, d’un même événement. « Fin de course / avec encore / l’envie de courir » et « tout est déjà colmaté / prévu // on attend ». À la fin, les bris d’enfance remontent percuter les pensées adultes : « il n’y a rien à raconter / c’est compacté en tête // valises de linge sale / bien tassé tout ça / dans la cave au charbon ».
Amandine Marembert


TERRE À CIELS
CÉCILE GUIVARCH
Les carnets du dessert de lune
(30 rue Longue-Vie – 1050 Bruxelles – Belgique)
31 pages – 6 €

Trouver le juste équilibre entre la terre et le ciel ne va pas forcément de soi. Dans son premier recueil, Cécile Guivarch dessine les contours d’un corps à corps renouvelé entre hauteur et profondeur, dimensions reliées par les traits d’union des arbres, de leurs feuilles, du vent. Entre ces fragments de nature, il faut tâtonner, interroger routes et fleuves pour trouver quelques réponses aux questions que pose parfois l’existence. Mais, ici, le ton n’est jamais grave. L’écriture, souvent elliptique, glisse comme nuages au fil du vent, emportant avec eux « d’avant en arrière / les songes [qui] s’allongent / s’étirent un peu à l’endroit où / mais rétrécissent à la lumière ».
Emmanuel Flory


LES ANGUILLES
ROGER LAHU
L’idée bleue
(6 place de l’église – 85310 Chaillé-sous-les-Ormeaux)
95 pages – 11,50 €

Ça commence, on dirait du Queneau. Des airs de carnaval rabelaisien. La langue est facétieuse, joueuse, « jouissive ». Roger Lahu « tripatouille » les mots, invente moult barbarismes joyeusement barbares : « j’enfance enfonce / là / je sens : j’avonce / j’avonce énormément /[…]/ j’énorme exhorbitamment / comme un gros ». Le ton est donné, croit-on, au cours de cette première partie jubilatoire qui évoque avec un sadisme de potache le rituel de la « dénudaison » des anguilles. Mais, à mesure que l’auteur "s’enfonce en enfance", fini les pitreries crânes. Place à une nostalgie profonde : la perte de la mère, un refrain oublié, et l’interdiction désormais de se baigner « dans les rivières de l’enfance ». Le petit garçon, devenu grand – et gros –, doit se « dépatouiller » tout seul.
Dominique Fournil


ALBANY
CHRISTOPHE LAMIOT ENOS
Flammarion
(26 rue Racine – 75278 Paris Cedex 06)
242 pages – 19.50 €

« Des pommes et des oranges, Californie - II ». Suite et fin du carnet d’une quinzaine d’années de vie aux Etats-Unis. Six parties comme autant de tracés dans les lieux. « A Ithaca, N. Y. ; d’Atlantic City jusqu’en Californie ; En Californie, 1986 ; Retour en californie, 1987 » ; Albany, Californie ; Vine Street, Brekeley ». Journal de bord ancré dans la réalité qui pourrait se lire d’un bout à l’autre comme un récit, au rythme des titres. Chaque poème est une longue saccade, parfois presque une ritournelle. « Sur la / peau nue, à la fois / blanche et rousse et verte, de ta jambe – / il fait noir, il fait / doux – tremble la soie, peau de ta jambe / touchée sous mes doigts ». Paysages, femmes, cuisine, transports s’entremêlent dans une même furieuse envie de vivre.
Amandine Marembert


OUH LA GÉORGIE
S. G. LUCAS
Polder
(20 rue du Pâtis – 89130 Toucy)
42 pages – 6 €

Titre intriguant d’appels dans le vent et de pleurs. « Je reviens au pays marées entre les dents ». Pays et paysages perdus malgré les retrouvailles. Pourtant, dans cet endroit de mer, l’eau daigne livrer des souvenirs d’enfance, en même temps que le sel se tient prêt à les ronger. D’où les réminiscences en bribes, à bout de souffle d’avoir trop couru, dans le fondu enchaîné des phrases. « Le linge claquant au-dessus des choux les épingles à linge comme des oreilles fantômes des bords de mer nous faisions la course à celui qui passerait le premier au travers ». Tout cela sous l’œil de la grand-mère éponyme : « ouh la géorgie / mémé blouse de nylon / murmure / fichu été comme hiver ». Les anciens y remuent le présent traversé de branches et de tempêtes.
Amandine Marembert


URGENCE SANS LUMIÈRE
MARCEL MIGOZZI
Wigwam
(14 boulevard Oscar Leroux – 35200 Rennes)
Non paginé – par abonnement

L’urgence dont il est question dans le titre, s’avère celle, froide, désinfectée, impersonnelle, qui s’opère dans un hôpital : « c’est le lit côté fenêtre sans lumière / sur la tablette aux biscuits secs ». Ton sec, pas de bavardage : écrire semble aussi une épreuve pour celui que la vue abandonne. Le vers, avec une économie de moyens, traduit au plus près le choc émotionnel, la souffrance morale éprouvée : « qui voit mal se souviendra-t-il / des lauriers-roses sur la rive ». On ressort bouleversé de cette lecture, de ce face-à-face du poète avec lui-même : « le silence occupe les yeux / mieux que la poésie // collyre dans les deux / comme si on jetait de la terre déjà ». Et l’admiration se mêle au respect pour celui qui se demande alors « comment c’était la chair d’enfant ».
Romain Fustier


LE PAYS DE L’ENNEMIE suivi de LES PERMISSIONNAIRES
FRÉDÉRIC POUCHOL
Polder
(20 rue du Pâtis – 89130 Toucy)
56 pages – 6 €

Autant le dire tout de suite, l’écriture de Frédéric Pouchol échappe aux appellations d’origine poétique contrôlées. Le présent replonge dans le passé, l’histoire se mêle au mythe dans une poésie dont la rythmique contemporaine convoque l’ambiance des romans gothiques du dix-neuvième siècle : « En mon pays égaré, la peur guette les hommes à la croisée des chemins, la peur cloue des chouettes sur les portes bossues ». Sur le mode de l’incantation, le poète compose des variations qui disent la rudesse de la nature, la convoitise de la femme : « En mon pays engoncé entre deux cours d’eau, se sont ébruités ton minois blanc, tes jambes amères comme du lait de chèvre ». Un livre obsessionnel.
Romain Fustier


TROIS ANCIENS POÈMES MIS ENSEMBLE POUR LUI REDIRE JE T’AIME
JAMES SACRÉ
Cadex
(334 Devois du Château – 30700 Saint-Siffret)
55 pages – 11 €

D’anciens poèmes qui, assemblés, « voudraient se croire encore neufs ». Le titre du recueil présente une gaucherie séduisante. « La femme et le violoncelle », première partie à refrains, réussit à faire de la musique et du paysage un prolongement reposant de l’amour physique. « La femme est longue comme la longueur douce du violoncelle, longue et dessinée dans sa forme longue ». « Un homme comme un arbre dans ses jambes et l’arbre remue ». Puis, « la transparence du pronom elle », deuxième partie du recueil, laisse entrevoir l’herbe, la pluie, les arbres, les oiseaux, les maisons à travers la vitre du corps de la femme. « Et toi mon amour marches avec des jambes d’arbres sur le visage heureux des maisons ». Troisième partie : « le taureau, la rose, un poème », plus réflexive.
Amandine Marembert


VOYAGE Á L’ENVERS DES JOURS
CHRISTIAN SAPIN
Le dé bleu
(6 rue de l’église – 85310 Chaillé-sous-les-Ormeaux)
107 pages – 13,50 €

La première section du recueil donne à lire des poèmes comme des aquarelles qui reflètent des paysages où le blanc a son importance : espaces vierges ouverts à un bien-être fugace, fissures où s’engouffrer dans une quête de sens, pages où fixer des instants d’apaisement. Les deux autres sections portent quant à elles le sceau de la déchirure, quand l’être cher vient à disparaître. La langue, toujours aussi limpide, se fait alors poignante, lorsqu’il ne reste plus qu’à « Se glisser dans le jour / Par l’écriture dérobée à la nuit / Doucement poser ma tête / Sur la page où tu ne seras plus ». Ni violence. Ni pathos. Seuls des mots d’amour simples et superbes, contre l’absence.
Emmanuel Flory


BUILDINGS
PIERRE SOLETTI
Rafaël de Surtis
(7 rue Saint-Michel – 81170 Cordes-sur-Ciel)
Non paginé – 12 €

Le titre est sec, mais, dès le début du recueil, une annonce est faite: « jamais plus / le sourire des villes / ne me sera indifférent ». Douceur du rapport à l’urbanité. Cascade d’images surréalistes qui suivent et alternent avec quelques poèmes plus réalistes, plus directement limpides. Entre simplicité et sophistication. La réflexion sur le langage est d’ailleurs plus réussie lorsqu’elle s’exprime implicitement, à travers la complexité du lexique et les chocs d’images. Ce qui est beau, surtout, c’est l’osmose entre le végétal, le minéral, l’humain et l’animal dans la ville : « rangées d’immeubles sous-cutané », « gratte-ciel d’arbres & de limon », « train vertical tressé de vent et de béton » ; « le linge sur les terrasses attend l’agile caresse d’une géométrie nouvelle ».
Amandine Marembert


ZONES SENSIBLES
ROMAIN VERGER
Quidam
(1 rue Mansart – 92190 Meudon)
96 pages – 10 €

Ceci est un roman, un premier roman, mais l’auteur le conçoit comme un prolongement de son travail poétique, que vous avez déjà pu découvrir dans nos pages. La construction de ce livre, l’imaginaire obsessionnel qui le traverse rappellent les proses d’un Michaud par les passerelles qu’ils tendent entre un hyperréalisme affiché au début du livre (le narrateur est un jeune enseignant « balancé » dans un collège difficile) et le basculement progressif dans un univers étrange qui ressemble cependant au nôtre comme deux gouttes d’eau. D’un paysage urbain industriel vu à travers la vitre du train, on va glisser vers un bord de mer fantasmé, on va sombrer dans la folie. Le mérite de Romain Verger aura été ici de trouver une langue comme au bord du précipice.
Romain Fustier