Deux corps qui se parlent

Sur le site "critiqueslibres.com", Sahkti chronique Habillé de son corps de Romain Fustier.

Les mots de Romain Fustier sont des mots d'amour, des mots ronds qui tournent avec plaisir dans la bouche et se faufilent dans les oreilles pour chatouiller nos sens."Habillé de son corps" ne déroge pas à la règle de cette élégance. La prose poétique du recueil, courts fragments qui disent l'autre, nous invite à un voyage du corps et de l'esprit à travers le regard, le toucher, le questionnement qui peut parfois faire mal quand il ronge nos envies mais peut aussi se révéler un formidable libérateur de nos désirs enfouis.

Elle et Lui, deux corps qui se parlent, deux mouvements au sein d'un environnement qui leur est extérieur, même lorsqu'il se montre hostile. A travers l'acte, il y a la vie, le geste, le mot que l'on ne dit pas et que les yeux racontent... Romain Fustier déploie tout son talent (et il en a !) pour nous faire vivre ces instants forts et fugaces qui composent nos existences.

C'est tout simplement magnifique de justesse, de simplicité et de douceur. Des traits de plume que j'apprécie tout particulièrement chez cet auteur amoureux des mots.

"ils ont eu leur petite tempête dans la chambre ce soir de tempête, leur lutte contre les éléments, les volets qui claquent, le souffle angoissant du vent à cette heure où les arbres plient dangereusement, où tout bruit semble précéder un effondrement, sinistre imminent, les draps en désordre, leurs halètements, un étranglement dans la gorge tandis que ça grogne dans le jardin, que leurs corps font écran au dehors, s'opposent à la tempête qui claque contre les volets, s'immisce dans les interstices des fenêtres, comme une hostilité subite à leurs deux corps accrochés l'un à l'autre, dans la maison où les mains de leur tempête écartent la tempête" (page 18)

La photographie de couverture de Matthieu Gosztola rend un bel hommage à ces pirouettes, à ces draps qui se froissent et ces corps qui se chevauchent, en toute franchise, sans artifices.